
Le feu de l’enfer dans le grand froid canadien
Franck Thilliez, un grand nom du polar français, était ingénieur en nouvelles technologies avant de se lancer dans l’écriture. Il est aussi scénariste et passionné de thrillers. Il lui arrive de faire des clins d’œil à d’autres personnages dans ses propres œuvres. Le manuscrit inachevé ou La faille sont des exemples de ses titres où l’on peut trouver des personnages récurrents, tel le commissaire Sharko qui enquête sur des affaires qui glacent le sang. Cette- fois-ci il s’agit de son 24e roman, Norferville, et il abandonne totalement ses enquêteurs habituels. D’abord un mot sur Norferville qui est une ville fictive qui ressemble à d’autres bien réelles, perdues dans le grand nord du Québec, dans le froid polaire et où l’on extrait du minerai de fer. De nombreux autochtones, des Innus, vivent là-bas, des métis aussi, dans cet univers hostile qui sert de base au roman.
Un criminologue français, Teddy Schaffran, apprend que le corps affreusement mutilé de sa fille a été découvert dans cette ville, à 13 heures de train de Montréal. Il part et rencontre là-bas une lieutenante de police métis, Léonie Rock, envoyée pour s’occuper de l’affaire. Elle est revenue après des années alors que, native des lieux et adolescente, elle avait été violée par trois inconnus. Teddy et Léonie vont s’allier pour trouver des réponses et arrêter le ou les meurtriers. Ils ne sont pas aidés par les habitants, qu’ils soient innus, blanc ou métis, ni par la police elle-même. Tout est hostile donc, en ajoutant le froid intense, les lacs, les forêts, les animaux sauvages, les hommes qui ne pensent qu’à la chasse et à la traque de ces jeunes filles amérindiennes qui, elles, ne cherchent naïvement qu’à trouver un monde meilleur.
C’est un roman très noir, avec beaucoup de rebondissements. Le style de l’auteur est très fluide, le vocabulaire très précis, sans aucune vulgarité ni hémoglobine inutile et récurrente. Le décor, la nature sont somptueux avec la neige, le vent et aussi les aurores boréales. Franck Thilliez a été beaucoup plus sobre cette fois-ci parce qu’il connaît cette partie du monde, qu’il s’est documenté et qu’il a voulu faire passer des messages, principalement sur le traitement réservé aux Amérindiennes. On frissonne de froid et de peur, mais l’on trouve que ce roman d’ambiance est très engagé et très beau. Un grand Franck Thilliez !