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Zoom sur "La Décision" de Karine Tuil

La Décision de Karine Tuil

« Il n’existe aucun moyen de vérifier quelle décision est la bonne. » Milan Kundera

Karine Tuil écrit ici son douzième roman, La Décision. Juriste de formation, elle se consacre aux romans sociaux qui « collent » avec l’actualité depuis quelques années. En 2019, elle reçut le prix Interallié et le prix Goncourt des Lycéens pour Les choses humaines. Il y était question de viol, de consentement, d’ascenseur social… Prix très mérités.

Ici, nous sommes en mai 2016. Alma Revel est juge antiterroriste au Palais de Justice de Paris. On parle souvent des victimes, des agresseurs, mais nous connaissons plutôt mal le travail des juges. Karine Tuil s’est beaucoup documentée, en a rencontré plusieurs et en première partie du livre, elle nous fait un portrait presque journalistique de ces hommes et femmes et évoque le poids de leurs responsabilités. Il s’agit cependant d’une fiction, ne l’oublions pas, même si elle repose sur des faits réels.

Un jeune Français musulman a été arrêté lors de son retour de Syrie. Il affirme ne pas y être allé pour rejoindre l’État islamique. Alma va devoir prendre LA décision ou bien de le libérer au risque qu’il commette un attentat sur le sol français, ou bien le maintenir en détention alors qu’il est peut-être sincère dans son repentir et qu’il pourrait se radicaliser en prison. Nous sommes donc au plus près de l’actualité. Le poids est terrible sur les épaules d’Alma, pour le jeune homme, pour elle-même et aussi pour la nation.
On suit son travail minutieux et les extraits des interrogatoires maintiennent le lecteur en haleine. On se rend compte que le choix est très difficile à faire et que c’est le travail quotidien de ces juges antiterroristes.

Une autre « décision » est aussi à prendre. Alma est mariée et a trois enfants. Son couple de plus de vingt ans se délite et son mari se tourne vers la religion juive orthodoxe. Elle est perdue et commence une liaison avec un avocat qui n’est autre que l’un des défenseurs du jeune musulman emprisonné. Autre dilemme, privé, intime, mais qui ajoute à la tension ambiante. Cette tension monte, nous effraie avant d’aboutir à une explosion (littéraire au moins).

Le sujet est brûlant et nous sommes « accrochés » par le style au scalpel de cet excellent roman.