Zoom sur La collectionneuse de mots oubliés de Pip Williams
Les mots se perdent-ils pour toujours ?
Pip Williams est née à Londres, a été élevée à Sidney et demeure avec sa famille en Australie-Méridionale. Elle a écrit des articles de voyage et de la poésie. Voici son premier roman.
L’Oxford English Dictionary (OED) est l’ouvrage de référence de la langue anglaise. Il a été commencé en 1857 pour remplacer le précédent datant de 1755. Le Dr James Murray dirige cette entreprise de rédaction, au fond de son jardin, dans ce qu’on appelle le Scriptorium où se trouvent réunis les lexicologues (tous des hommes) chargés de recueillir les fiches leur apportant de nouveaux mots, de les annoter… pour savoir lesquels seront admis dans le Dictionnaire. Tout cela est historique. Cependant, l’auteure va créer un personnage qui prend toute sa place dans ce roman. C’est Esme, une petite fille de 5 ans, orpheline de mère, qui est élevée par un père extraordinaire de bonté et d’ouverture d’esprit, lexicologue au Scriptorium. C’est merveilleux, car, il faut se rappeler, nous sommes sous les contraintes de l’époque victorienne. Esme passe son temps sous la table à la recherche des fiches qui peuvent être tombées ou perdues. La première qu’elle ramasse est dédiée au mot « bonne-à-tout-faire » et à son explication. Elle cache sa trouvaille dans le fond d’une malle comme toutes celles qu’elle rencontrera par la suite. Elle en fera le but de sa vie et au fil du temps se rendra compte que les mots « des femmes » ne sont pas retenus, et, devenue adulte, elle ira à leur recherche, sur les marchés, par exemple. Même s’ils sont vulgaires ou grossiers, ils existent et se doivent d’être répertoriés. Elle va donc décider de rédiger Le dictionnaire de mots oubliés. Nous la suivons jusqu’à la publication du douzième et dernier volume de l’OED, en 1928, année. Vous trouverez un ajout en 1989, au moment de la parution du nouvel OED. Vous en connaitrez la raison en lisant ce roman !
Historiquement nous traversons la période 1857-1928 avec un œil curieux sur la vie en Angleterre sur l’évolution avec les suffragettes, sur la place des femmes, sur la Première Guerre mondiale, côté britannique, mais en France. N’oublions pas non plus la visite de la si belle ville universitaire d’Oxford.
Un roman palpitant avec de très beaux personnages (non évoqués ici mais si attachants). Un grand bravo à Pip Williams pour son style alerte et fluide et un autre à Odile Demange, sa traductrice, qui a su trouver les « mots » pour les « mots » !